Il est amusant de voir (ou de revoir) aujourd'hui L'âge ingrat de Gilles Grangier, premier film produit par la Gafer, société de production créée par Jean Gabin et Fernandel (Ga + Fer), car il est un témoignage du sérieux qu'incarnait la firme Peugeot dans les décennies dites des trente glorieuses. Dans ce film, les acteurs en tête d'affiche, présentent deux types d'hommes particulièrement différents et que tout semble opposer. Adolphe Lartigue (Fernandel), est ... Fernandel avec toute l'exubérance qu'on lui connait. Il roule en Citroën DS19. Émile Malhouin (Jean Gabin), roule en 404 et est plutôt du genre sérieux à la limite du vraiment pas drôle. On sent que chez les Malhouin on est Peugeot, un peu comme François Pignon le dit à Ralf Milan dans l'Emmerdeur d'Édouard Molinaro. D'ailleurs si ce deuxième film est parvenu au statut de "film culte" au fil des décennies, c'est loin d'être le cas du premier. L'âge ingrat, est assez poussif et on sent que le metteur en scène a tout fait pour ménager les caractères bien trempés des deux acteurs au détriment de la réalisation. Néanmoins on peut encore prendre du plaisir à le voir sous l'œil de l'anthropologiste.
Dans
les années cinquante et soixante, Citroën sous la direction de Pierre
Bercot, s'est positionné sur l'entrée et le haut de gamme, et a joui de cette image d'innovation à marche forcée qu'avait instauré André Citroën à la sortie de la 7cv en 1934. Hélas ses coups de théâtre (*) se sont parfois soldés par des gros plâtres essuyés par les premiers consommateurs. Pierre Bercot
pensait entre autres, que les gens souhaitant acquérir une automobile en ne tenant
compte que de critères économiques, ne l'intéressaient pas plus que ça.
Pas les ouvriers, paysans, et autres consommateurs de 2 et 3cv, mais
plutôt ceux qui cherchaient un entre deux, ceux qu'il devait tenir pour "tièdes".
Au final ce grand écart
coutera cher à la firme de Javel dans les années soixante, laissant s'engouffrer dans la brèche
Simca, Renault et Peugeot dont la 204 sortie en 1965 par exemple, fut une
immense réussite commerciale. Citroën essayera de rattraper le tir avec la sortie de la GS en 1970, mais le mal était fait. En outre à cette époque, l'automobiliste aimait souvent s'identifier à un constructeur quitte à user de la mauvaise foi la plus navrante. Récupérer la clientèle d'un concurrent n'était donc pas chose aisée.
Peugeot, axait plutôt sa communication sur le sérieux, la fiabilité éprouvée, voire sur une certaine austérité, et l'on comprend aisément que ce constructeur avait un grand nombre d'adeptes ne cherchant pas la démarcation tapageuse au volant de leur automobile, coupés et cabriolets exceptés bien entendu.
Une 404 en plein tractage d'une remorque plutôt surdimensionnée |
La 404 est pour moi, associée à deux souvenirs de très petite enfance. Déjà en maternelle, au crépuscule de l'ère giscardienne, la DS était pour moi une réelle obsession. Je devais avoir cinq ou six ans et un camarade de classe avait apporté une DS19 Micro Norev de couleur mauve dont le pavillon n'était plus qu'un lointain souvenir. Ce garçon dont j'ai tout oublié, affirmait que c'était une 404, ce qui avait eu le don de m'horripiler. En fin de journée je repartais avec la si fascinante petite DS. Je me vois encore jouer avec, chez un ami de mes parents le soir, puis plus rien. Il faut avouer qu'à l'époque, si j'étais intéressé uniquement pas les automobiles anciennes, j'étais un enfant peu soigneux avec une énorme fascination pour les casses automobiles et les sorties de grange...
Le deuxième est plus furtif et se passe à peu près à la même époque, j'attendais pour traverser l'avenue Duquesne avec mon père, et passe sur la chaussée une 404 absolument rutilante. J'en fis la remarque à mon père, lui disant qu'elle était neuve, mais il me répondit qu'elle était ancienne. Il me fallu encore quelques années pour appréhender le concept de l'ancien en état neuf.
Plus récemment, il y a une dizaine d'année, j'ai dû batailler ferme pour "gratter" une 404 sur la Méridienne au volant de ma DS19 à l'occasion d'un retour de vacances dans le Golf du Lion... La boucle était bouclée.
Avec une sortie officielle le 13 avril 1961 dans la presse enfantine, la 404 Micro Norev est la troisième miniature sortie cette année là par l'entreprise des frères Véron. L'année précédente avait été particulièrement riche avec beaucoup de modèles et la crétion de la "Servo-Direction", et l'équipe technique a dû avoir un travail intense en ce début d'année, ce qui explique le peu de nouveautés au premier trimestre 1961. À sa sortie elle ne possède pas de référence, il faudra attendre 1963 pour qu'elle obtienne le numéro 517, la version non attelée prenant elle, le 518.
Son histoire est relativement simple avec trois variantes et un seul
type de boîte, c'est la dix-neuvième Micro-Miniature de Norev sortie depuis 1957, et l'avant dernière à sortir en boîte
dite "caisse" ou "container". Elle la conservera tout le temps de son exploitation jusqu'en
1964, année où elle disparait du catalogue. Bien qu'ayant très certainement été réimprimée au moins une fois, la boîte ne
montre absolument pas de différence d'impression et présente toujours la bande verte sur le rabat principale indiquant le tarif de sortie en 1961, à savoir 1,90 nouveaux francs. Notons néanmoins que dès l'année suivante, le prix de la 404 avec remorque, passe à 1,50 nf soit le même coût que les autres automobiles de la collection des Micro-Miniatures de Norev, et qu'au catalogue 1963, à l'instar du reste de la gamme, elle ne coûte plus que 1,20 francs.
Cette baisse tarifaire peut éventuellement s'expliquer par la complexité apportée par une unique miniature à un prix différent dans la gamme. D'autre part, dès 1962, elle est épaulée par la version sans attache de remorque, commercialisée en boîte "écrin transparent" à socle dur de couleur bleue, puis souple de couleur noire à partir de 1964, qui permet de proposer deux miniatures différentes à partir d'un seul moule.
Il est très plausible que son retrait du catalogue vînt de la décision
de passer les Micro-Miniatures de Norev à 1 francs seulement en 1964, par
abandon du lest en plomb. La 404 avec sa remorque pourrait avoir été
considéré comme n'étant plus suffisamment rentable à ce nouveaux tarif.
L'automobile se trouve en trois couleurs : orange rosé, vert clair et lavande avec de légères nuances notamment sur l'orange et le vert. Les jante sont rouges chaussées de pneus blancs. La remorque et soit verte avec une bâche grise, soit plus rarement grise avec une bâche verte, ses jantes sont vertes chaussées de pneus noirs. La 404 est toujours lestée et la bâche est lisse, si l'on est très "complétiste", cela fait déjà au moins six miniatures à collectionner.
Elle est identique à la première variante sauf pour la bâche qui maintenant présente un grand pli en son milieu ainsi que de plus petits sur ses côtés. Dans les faits, il semblerait que le changement de moule de la bâche ait été effectué avant même la commercialisation, le deuxième type étant illustré sur la réclame annonçant la sortie du modèle. En revanche Raymond Léonard, si il a illustré le deuxième type de bâche sur la boîte, a dessiné le premier pour le catalogue.
Troisième variante 1962 - 1963
Facile à reconnaître, elle est toujours lestée, mais les jantes de l'automobile comme celles de la remorque sont dorénavant chromées et chaussées de pneus noirs. Ayant été commercialisée plus longtemps cette variante offre une gamme de coloris plus variée, certains peuvent se trouver avec un tout petit peu de difficulté, d'autres sont vraiment rares. Les couleurs constatées à ce jour sont : Lavande (nuance différente de celle des version 1 & 2), bleu clair grisé, bleu dur, gris clair (deux nuances), émeraude, rose orangé clair et le fameux rose orangé fluorescent typique du début des années soixante chez Norev.
À priori on ne peut trouver de remorque aux jantes chromées associée à une automobile à jantes rouges, je n'en ai jamais vu, mais il y a eu quelques bizarreries a cette époque de transition que ce soit au 1/43ème comme au 1/86ème. D'autre part si les remorques étaient fournies de manière aléatoire quant à leur couleur, la bâche n'est jamais du même coloris que la remorque en configuration usine.
Du côté de la concurrence, on pense bien évidemment à la très sympathique Dinky Toys référence 536 sortie en 1965, on trouve aussi un attelage 404 absolument craquant chez le concurrent fratricide Majorette, mais il s'agit là d'une 404 familiale. Enfin chez Norev, on ne peut évidemment oublier de citer le splendide coffret 404 & caravane Digue "14" tant recherché de nos jours.
La 404 Micro Norev avec sa petite remorque est une des plus belles miniatures à l'échelle HO, ses coloris, surtout en version 1 et 2 la font ressembler à ces gros bonbons que l'on trouvait dans les bocaux de verre sur les devantures extérieures des confiseurs d'antan. Elle reste un incontournable pour tout amateur de jouets de cette époque, qu'il soit particulièrement porté sur les petites échelles ou non. Il est enfin intéressant de noter que contrairement à l'usage chez les fabricants de jouets, Norev n'a pas utilisé un modèle dont les ventes étaient en perte de vitesse pour créer cet ensemble, mais a proposé une vraie nouveauté, tout comme la Chrysler New-Yorker tractant la remorque surmontée du Hors-bord Rocca, sortie un an avant la version sans crochet d'attelage.
(*) Pas pu le laisser passer celui là, désolé
Un article rédigé par Erwan Pirot
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