Éssai : ATC Model Pet - Toyopet Crown Deluxe RS

Réclame vantant la qualité de la peinture japonaise
En juin 1947, les industriels japonais eurent enfin le droit de relancer leur production d'automobiles. Depuis la fin de la guerre, seuls les camions avaient le droit d'être fabriqués. Sachant que cette autorisation allait arriver dans un temps plus ou moins court, Toyota avait lancé l'étude d'un petit modèle de faible cylindré qui allait devenir la Toyopet SA. Car, oui, au passage les automobiles Toyota (anciennement Toyoda) étaient devenues Toyopet, ce nom qui avait été approuvé par les consommateurs nippons lors d'un référendum, perdurera jusqu'en 1967. Toutes les automobiles Toyota créées durant ces vingt années sont donc des Toyopet.

La Crown dans sa version de lancement en 1955
Après avoir lancé la SA, une sorte de mélange stylistique amusant d'une Coccinelle et d'une Studebaker State Commander dont les ventes furent catastrophiques en raison d'une demande quasi-exclusive pour les utilitaires en cette fin des années quarante au Japon, Toyota se lance donc dans l'étude d'une routière avec pour ambition additionnelle un fort désir d'exportation : ce sera la Toyopet Crown RS. C'est Kiichiro Toyoda lui même qui en lance l'étude en 1952 à son retour à l'usine deux ans après sa démission dues aux conséquences du plan Dodge. Malheureusement le grand patron meurt quelques mois après à l'age de 57 ans, d'une hémorragie cérébrale due à une très longue période de maladie certainement générée par le stress qui n'a fait que s'accentuer tout au long des années quarante.
 
Kunio Kaminomura et Koujiro Kondo peu de temps avant le baston
La Crown malmenée au Tour d'Australie 1957
La Toyopet crown est révélée au public en janvier 1955, c'est l'ingénieur Kenya Nakamura qui en a supervisé les trois années d'étude conjointement avec un autre modèle, la Toyopet Master RR. L'idée est de créer une gamme proche de l'utilitaire et une autre pour les acheteurs particuliers. Au final la Master sera un four, les principaux clients visés : les chauffeurs de taxis, préférant de très loin la Crown à la Master en raison notamment de sa suspension avant indépendante, gage d'un confort accru. Qu'à cela ne tienne, Toyota supprimera rapidement la Master et introduira la Crown Deluxe RS21 avec tout le raffinement autant intérieur qu'extérieur que l'on peut attendre d'une automobile "de tourisme" au milieu des années cinquante : qualité de peinture, du chrome partout où il est possible d'en mettre, intérieur luxueux avec radio de série etc., et de jolies portières antagonistes qui feront surnommer l'automobile "Double-door Crown". Tout cela en conservant la Crown RS20 pour ces satanés chauffeurs de taxi récalcitrants. La Crown RS21 est présentée au salon "Tokyo Motor show" de 1958 qui a lieu en extérieur au vélodrome de Korakuen. Ce sera d'ailleurs la dernière année que le salon se déroulera en extérieur, les grosses pluies automnales de cette année là, pousseront les organisateurs à se tourner enfin vers un complexe abrité apte à accueillir la manifestation.

Kenya Nakamura
Mais revenons un instant en 1957, année où Toyota décide d'engager une Crown au Tour d'Australie, course réputée comme une des plus difficile à l'époque, 10000 miles en 19 jours avec seulement 5% de route goudronnée. Qu'à cela ne tienne, la Crown a été prévue pour les routes japonaises dont la qualité est à ce moment encore plus proche du chemin de terre que de la Freeway. 52 des 86 véhicules engagés terminent la course, dont la RS qui termine 47e au classement général (troisième à celui des véhicules étrangers), sans aucun soucis majeur, ce qui est plutôt bien car l'équipe est constituée de deux ouvriers chevronnés de l'usine, d'un navigateur australien, et d'outillage. Rien d'autre, pas d'assistance ni aucune équipe sur place, l'esprit pionnier quoi !

Présentation en 1958, la RS21 avec sa découpe de peinture et ses flancs blancs ne manque pas d'allure
Très vite Toyota se tourne donc vers les État-Unis où, après une arrivée remarquée - le luxe de la Crown rebaptisée "Crown Custom" pour l'occasion, lui valant le surnom de "Baby Cadillac" - les clients américains déchantent, la Crown RS a été étudiée pour l'infrastructure routière japonaise encore balbutiante et non pour les longues autoroutes. Lourde, lente, bruyante, malgré le réalésage permettant de passer de 48 à 60 chevaux pour la version "export", elle arrive très péniblement à monter à 130km/h et encore son comportement routier semble plus que laisser à désirer à cette folle vitesse.
En ce début des années soixante, Toyota jette l'éponge et se recentre sur le Japon durant quelques années, peaufinant au fil des mois ses automobiles. Même si Nissan qui réussit mieux a pénétrer rapidement les marchés occidentaux, que Honda surtout chez nous, s'est taillé une réputation quasi légendaire avec la S800, on sait soixante ans plus tard, ce qu'est devenue l'entreprise Toyota, et l'on connait son rayonnement sur le marché automobile mondial.

L'industrie automobile japonaise calquant les principes ayant cours aux États-Unis, les déclinaisons sont très nombreuses et les renouvellements stylistiques récurrents. De plus les appellations et finitions sont différentes pour les exportations. Arriver à s'y retrouver est souvent très compliqué des décennies après, et la barrière de la langue apporte bien évidemment son lot de difficultés supplémentaires. Enfin, souvent les jouets peuvent représenter un instantané dans une production en constante évolution, et "reprendre" un moule s'avérant très coûteux à cette époque, nombre d'automobiles ne seront finalement trouvable qu'en miniatures. La Asahi Toys Company reprend donc légèrement le moule de sa RS21 pour sortir la Custom quelques temps après. Le jouet, première référence de la nouvelle ligne appelée "Model Pet" est très réussi avec un bon degré de finition dans le moulage, et soutient très bien la comparaison avec la concurrence occidentale importée dans l'archipel.
Pet étant le mot par lequel les anglo-saxons désignent leurs animaux de compagnie, par extension il peut être attribué à ce qui est mignon et les japonais étant facilement clients de tout ce qui est "kawaii", le terme pet s'est imposé y compris chez la concurrence.

La Crown Custom remplace la Deluxe an 1960, néanmoins ATC n'en changera pas le nom


 
À gauche la Toyopet Crown RS20 de 1958 et à droite la Toyopet Crown Custom (ex Deluxe) de 1961

Moins guindée que les photos officielles mais de ce fait moins bien cadrée aussi, une sympathique photo d'époque

Premier importateur historique de miniatures automobiles au Japon, la Asahi Toys Company se rend vite compte de l'immense succès auprès du public japonais de ces petites autos et ses dirigeants se mettent tout aussi vite à penser, à raison, qu'une gamme de miniature "domestiques" aurait entièrement sa place parmi les Dinky Toys et Corgi Toys qui se vendent déjà comme des petits pains.

Le choix du premier modèle est porté sur la Crown RS 21 présenté en fin d'année 1958. Nous sommes donc courant 1959 et Toyota vient de renouveler le style de son modèle avec notamment une nouvelle calandre plus seyante. La miniature Model Pet n° 1 représente donc un modèle qui n'aura été disponible que sur le marché japonais. Physiquement il se reconnait rapidement par sa décoration sur les ailles arrière, son pied milieu orné d'un répétiteur peint en rouge, et par le fait que les clignotants ou plus certainement, les phares additionnels aux extrémités de la calandre, ne sont pas peints.
À l'instar des premiers Corgi Toys, le Model Pet n°1 possède un vitrage, et est globalement assez inspiré des réalisations de la marque aux chien-chiens de la reine. Les coloris constatés sont Bleu foncé métallisé ( deux nuances ), Brun métallisé ( deux nuances ) Or pâle verdâtre, métallisé également et enfin rouge et blanc. Il existe aussi un tirage dont la référence est 1G... G pour Gold je vous laisse deviner la couleur de la chose.
 
Fin 1960, la Toyopet Crown Deluxe 1961 succède à la Crown Deluxe RS 21 au catalogue ATC, La RS 21 n'est plus produite par Toyota et ce modèle est identique à la RS 30 qui s'exporte aux États-Unis, seul le nom semble diffèrer légèrement, Deluxe au Japon et Custom à l'exportation. Mais très vite l'appellation Custom sera définitivement utilisée au Japon. On reconnait facilement cette nouvelle version (renumérotée 12) au changement du traitement des ailes arrières, à l'absence du répétiteurs sur le pied milieu et au fait que les clignotants (ou phares additionnels), sont dorénavant peints en orange.
 
Les coloris sont Bleu métallisé plus clair que sur la première version, bleu vert métallisé et corail.




Enfin, troisième et dernière évolution de la RS par Model Pet, elle offre maintenant un intérieur et une suspension. La référence encore une fois influencée par Corgi Toys se trouve flanquée d'un S. Nous sommes très certainement en 1962 et la RS31, ultime variation de ce modèle, va être remplacée cette même année par la S40. Les deux principales marques de miniatures ATC et Taiseiya vont très vite offrir cette nouvelle voiture à leur clients et la RS va très rapidement quitter le catalogue et les boutiques de jouets.
 
Cette version se trouve en bleu métallisé , en doré verdâtre métallisé et dans un vert métallisé bien pétant que n'auraient pas renié les décideurs de chez Corgi Toys

 
 
Outre les changements évidents  tels que les ailes arrières, on note un travail plus précis quant aux détails de la deuxième version
 
 
Version 2 à gauche et 3 à droite, signe d'une commercialisation axée sur l'Archipel, la conduite est à droite

 
La Crown Deluxe RS Model Pet termine sa carrière, comme de nombreux autres jouets automobile toutes marques confondues passés de mode, dans une version alternative, en l'occurrence avec une décoration Police noire et blanche un peu plus difficile à trouver. Référence 12 SP.
 
 Un article rédigé par Erwan Pirot

1 commentaire:

  1. Dear Erwan, thanks a lot for the ATC-Model-Pet-essay and the rare photos! For a collector like me, interested in Japanese cars, it's always exciting to read about the history of the former Japanese model car scene. We are still busy with our book, it's gonna be great!

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